dimanche 12 janvier 2014

Les Français et l'autorité

"Une étude réalisée par la Varkey GEMS Foundation en 2013 sur la perception du métier d'enseignant à travers le monde souligne aussi le manque de respect affiché par les élèves français.
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/01/06/01016-20140106ARTFIG00557-les-enseignants-francais-particulierement-mal-consideres.php
C'est en Chine que les enseignants jouissent du statut social le plus élevé. Suivent ensuite la Grèce, la Turquie et la Corée du Sud parmi les pays qui ont le plus d'estime pour leurs professeurs. La fondation a demandé quelle était la profession qui s'apparentait le plus à celle d'enseignant: travailleur social, infirmière, gestionnaire de gouvernement local, bibliothécaire ou médecin. Une comparaison particulièrement éclairante sur la façon dont les enseignants sont perçus dans les différentes cultures. En France, c'est la profession de bibliothécaire qui précède de peu celle de travailleur social pour la majorité des gens. 
La grande admiration pour les enseignants en Chine se distingue nettement, les habitants de l'empire du Milieu étant les seuls à comparer les enseignants à des médecins. Cette réponse confirme le fait que l'importance de l'éducation est très marquée dans ce pays. «Les enseignants y sont vénérés», selon le professeur Peter Dolton, professeur à l'université de Sussex, chercheur à la London School of Economy et coauteur du classement. En revanche dans des pays, comme la France, la Turquie, le Brésil, les États-Unis où les enseignants sont comparés à des bibliothécaires, leur relation avec les parents n'apparaît pas comme très chaleureuse. Les enseignants sont «considérés comme de simples administratifs qui remplissent leur tâche de façon formelle». L'une des particularités françaises, c'est le manque de respect affiché par les élèves, si l'on en croit l'étude. La moitié des Français interrogés estiment ainsi que les élèves ne respectent pas leurs enseignants." 
On se demande quels collaborateurs et quel citoyens deviendront les élèves français dans quelques années... Encore plus complexes à manager et à gouverner probablement.
Le rapport des Français à la hiérarchie est difficile à expliquer aux Chinois du fait de cette contradiction subtile:"en France, la hiérarchie est importante, mais est toujours contrebalancée par la critique permanente de l'autorité" (selon la formulation éclairante de D.Rey). 
Car pour eux hiérarchie implique harmonie, donc absence de contestation, intériorisation des désaccords éventuels. 
Sauf qu'en France on déteste les rois...
Chez nous, on critique "par principe". Ne pas critiquer signifie qu'on n'a pas l'esprit critique, donc on est bête.
Ce risque de passer pour moins intelligent est une motivation que j'ai trouvée pour convaincre les Chinois d'exprimer les critiques qu'ils gardent habituellement par devers eux.

Donc les Chinois travaillant dans des entreprises française ont tout intérêt à développer l'esprit critique mais aussi à supporter celui de leurs collaborateurs français s'il en managent. 
En effet, au grand agacement des managers chinois, les collaborateurs français ont la manie de "discuter" les décisions du patron. Ils veulent non seulement être consultés, écoutés mais aussi convaincus. Prendre le temps de convaincre, en utilisant des arguments rationnels, c'est démontrer son respect. En France, le statut de subordonné et l'obligation d'obéir au supérieur est vécu comme humiliant. Cette spécificité française est une des expressions de la "logique de l'honneur" mise en lumière par D'Iribarne, et que l'on retrouve aussi à l'œuvre dans la relation de service.
 
Forcément, les systèmes éducatif et politiques portent la marque de ce trait culturel et lui assurent en même temps sa pérennité.