mercredi 6 juillet 2011

TGV et créativité chinoise

Au moment où la Chine produit ses premiers Trains à Grande Vitesse, le souci de d'autojustification du Bureau de Transport du Ministère est tout à fait révélateur. Dans l'article de la semaine dernière relatant une conférence de presse dans laquelle CSR Qingdao annonce la naissance du CRH380A, le TGV chinois roulant à 380 km sur la ligne Beijing Shanghai, le plus important est ce qui reste non-dit: la question de l'origine des technologies employées...

Ainsi nous informe-t-on que les conseillers juridiques General Electric, après enquête, n'ont pas revendiqué la paternité du savoir-faire.
En 2004, CSR a conclu un partenariat avec Kawasaki Heavy Industries pour produire un train roulant à 200 km/h que Kawazaki a transféré la technologie. C'est en se fondant sur cette base que CSR aurait développé le TGV roulant à 300 km/h puis 380 km/h.

La direction de CSR a déclaré:" Nos technologies sont peut-être originaires de pays étrangers mais cela ne veut pas dire que ce que nous avons aujourd'hui leur appartient en totalité. Nous y avons ajouté nos propres connaissances glanées à partir d'expériences faites sur le train et créé des modèles destinés à nos besoins, ce qui fait que le nouveau train ne leur appartient plus."


Intéressant point de vue qui illustre d'abord le mode d'apprentissage inductif, expérimental chinois. Intéressante conception de la propriété intellectuelle, en tout cas très différente de la vision occidentale qui s'enracine au contraire dans la notion d'origine garante d'authenticité.

Ce discours est la parfaite mise en application de la politique technologique de Hu Jintao énoncée en 2006: "innovation avec caractéristiques chinoises".


En effet, comme nous l'explique l'excellent article de J.C. Yacine sur le site Questionchine.net, l'effort de modernisation du pays lancé par Deng Xiaoping repose sur deux stratégies: développer la recherche interne appelée "innovation indigène" mais c'est extrêmement ardu de combler un tel retard de manière endogène.


"La seconde voie consiste à s'appuyer sur les technologies étrangères en procédant à la co-innovation" (résultat d'efforts de recherche en commun entre chercheurs chinois et étrangers) et à de la "re-innovation" (améliorer les technologies importées de l'étranger), ce qui doit permettre de gagner du temps, en partant de plus haut."


"La priorité est donc imposée aux produits dont l'importation s'accompagne d'un transfert de technologie et de programmes de formation."

Et c'est là qu'intervient le talent chinois pour l'apprentissage par l'observation, l'expérimentation, le re-engineering, et la copie des techniques .... sans passer par la case départ.


Le contenu de technologie "indigène" devient un critère de sélection dans les appels d'offre publics. "Tout est mis en oeuvre pour aider les entreprises chinoises à déposer des brevets", d'où une inflation de dépôts "que viennent récompenser primes, subventions et autres avantages. Parmi ces droits (privatifs)nouvellement créés figurent les "modèles d'utilité", une forme de "sous-brevet d'invention", qui s'obtient rapidement sans examen préalable de validité."


Ce que l'auteur juge préoccupant c'est que "c'est le nombre et non la qualité qui semble cosntituer le principal critère. Cette inflation qui ne contribue sans doute pas à élever le niveau de l'innovation en Chine, constitue un anger considérable. L'affaire Schneiderc/Chint en est l'exemple le plus spectaculaire (le leader mondial français s'était vu condamner à payer plus de 30 millions d'euros à Chint, son propre contrefacteur, qui avait déposé un modèle d'utilité correspondant à un détail technique antérieurement mis au point par Schneider.

La propriété intellectuelle s'est mise au service du protectionnisme.




Gare à ceux qui voudraient copier le TGV chinois!

Retournement de l'histoire, inversion du rapport de force, ce bijou technologique intéresse beaucoup les USA aujourd'hui...