jeudi 22 juillet 2010

les syndicats en Chine ne servent à rien

Tout le monde le sait, mais ce qui est intéressant c'est que cette condamnation sort de la bouche de Qian Chuanshui, Vice-directeur de l'école des cadres syndicaux de l'Anhui, dans une interview accordée à l'abdomadaire méridional Nanfang Zhoumo.


Comme les dirigeants syndicaux chinois sont forcément des dirigeants du Parti communiste en même temps, ils sont bien embêtés en cas de grève car leur double casquette met en conflit des priorités contradictoires: les intérêts de ouvriers OU la stabilité sociale. "Ils changent de visage selon les circonstances", ce qui nuit gravement à leur crédibilité aux yeux des travailleurs qu'ils sont censés représenter.


Qian reconnaît que parfois le syndicat a, dans certaines entreprises, une "action émouvante" (ganren) L'utilisation de cet adjectif révèle une vision très paternaliste du syndicalisme associé à de l'aide sociale plutôt qu'à une lutte pour les intérêts des salariés. Ainsi le rôle des syndicalistes se limite à rendre visite aux malades et préparer les salles de réunion.


Chez Foxconn, le syndicat n'a pas été capable d'empêcher la direction de faire signer aux ouvriers des contrats illicites les autorisant à travailler 100 heures hebdomadaires au lieu des 40 heures réglementaires.


La critique de Qian à l'encontre des syndicats chinois est sévère: népotisme, bureaucratisme, langue de bois, gabegie, lâcheté des dirigeants...


Enfin l'auteur de l'article se demande pourquoi les syndicats sont plus puissants dans les JV sino-étrangères que dans les entreprises 100% chinoises... Cette critique du syndicat porterait-elle une critique plus profonde du système dans son ensemble?


(source: China Analysis mars-avril 2010)

Au coeur des laboratoires chinois

HEC Eurasia dans la newsletter publie en mai dernier une intéressante analyse signée Nadège Guénec (experte en intelligence économique) de la perception que nous, Occidentaux, avons de la Recherche en Chine.
D'abord l'acquisition de technologie s'est faite "en apprenant de l'étranger", par tous les moyens, stratégie pragmatique de Deng Xiaoping dans les années 80. Ainsi "les appels d'offre aux sociétés étrangères pour réaliser des projets mirobolants en Chine. Par ce biais et en jouant à fond d'un concurrent contre l'autre, le pompage technologique est particulièrement efficace."
Il me semble que l'on retrouve ici la vision chinoise daoïste de l'efficacité, empirique, inductive, fondée sur l'observation, l'opportunisme et la capacité à jouer d'un rapport de force (qui a le plus besoin de l'autre? On sent bien que la balance penche maintenant du côté chinois!). Plutôt que de chercher à inventer à partir de zéro, inspirons-nous de ce qui existe, et copions ce qui marche!
Aujourd'hui à travers une véritable politique industrielle "magistralement pensée et parfaitement réalisée", le gouvernement chinois se donne les moyens de sortir le pays de son rôle d'"atelier du monde" en développant la Recherche locale.
Pour ce faire, par exemple, des ponts d'or sont proposés aux chercheurs chinois exilés aux Etats-Unis après que la Révolution culturelle ait fini de décimer l'élite intellectuelle du pays.
Les grandes entreprises comme Huawei ou Lenovo ont un accès illimité au crédit via les banques publiques.
Le nombre gigantesque de brevets déposés donne l'image de cet "activisme" en matière de R&D(même s'il ne nous dit pas grand chose de leur contenu et donc de leur réelle valeur ajoutée scientifique: est-ce de la Recherche fondamentale ou du Développement de produit?).
"Si la Chine reste le plus gros contrefacteur mondial", c'est en même temps un des premiers pays en terme de dépôt de brevets... Paradoxe qui n'en est pas un si on accepte d'ôter nos lunettes (juridiques) occidentales pour chausser celles du relativisme absolu et du pragmatisme qui domine la pensée chinoise. A partir du moment où ils innovent, les Chinois sont d'accord pour dire qu'il ne faut pas copier...
"La Chine demeure mystérieuse à ceux qui n'y ont pas développé leur propre courbe d'expérience, parce que l'obstacle de la langue la protège largement, on pense généralement que la Recherche chinoise est un domaine inacessible, une sorte de trou noir impénétrable aux regards. Rien n'est plus faux."
Ainsi, nous ne nous rendons pas compte du nombre énorme de publications scientifiques chinoises, dont très peu sont traduites en anglais. Une recherche sur le web chinois permet de prendre conscience de l'effort d'investissement des laboratoires chinois dans le domaine des biotechnologies par exemple, et aussi des réseaux que ces instituts de recherches ont tissé avec l'administration et les entreprises localement.
L'information est là, il "suffit" de savoir la lire nous dit l'auteur.
Mais c'est bien ça la question!